Initié il y a quelques mois, le cycle « La Plume et le Bitume » fait entrer le rap à l’École Normale Supérieure afin de décortiquer les textes et/avec leurs auteurs. Vîrus, Lino, Kohndo, Dooz Kawa ainsi que Casey ont pris place au centre de l’amphi afin de parler phases, vers et figure de style.

« Le rap […] n’a pas besoin d’être légitimé par les grandes écoles » (Casey, lors de sa rencontre à l’ENS), non, mais il l’intéresse. Et pour cause, la richesse et la puissance des textes des raps d’hier ou d’aujourd’hui n’ont parfois rien à envier aux grands auteurs de ce siècle. N’en déplaise aux snobinards de la culture, la « musique délinquante » est un des arts populaires majeurs de notre époque ; du bistrot des poètes à la rue des rappeurs d’aujourd’hui, il n’y a qu’un vers, qu’un joint, qu’un pied.

Concrètement – sans pousser l’analyse du qui ou du pourquoi – en tant que simple spectateur de ces rencontres, ces vidéos ont un triple intérêt :

Numéro 1. Celui d’abord de l’interview cadrée, mais non professionnelle, réalisée en toute simplicité mais toujours intelligente. Une rencontre que l’on sent organisée et vécue par des animateurs, Emmanuelle Carinos et Benoît Dufau, passionnés du texte et des textes des rappeurs invités.

Chose amusante d’ailleurs, face à ces artistes d’une étonnante simplicité, les deux intervenant semblent, eux, parfois fort intimidés ; fans cachés… découverts par l’oeil de la caméra.

Numéro 2. L’intérêt, ensuite, de se faire expliquer le texte : d’entendre les sous-titres ou même la genèse d’un morceau, d’une phase ou d’une punchline. C’est un traitement qui n’est réservé, dans le mass-media, qu’aux auteurs de livres de pouvoir expliquer leurs mots ; plus rarement aux musiciens, encore moins à ceux qui mêlent ces deux parts. Comprendre les parcours, les lectures, les influences ; décortiquer les rimes et les figures… Saisir l’essence d’un morceau en augmente inévitablement l’appréciation.

Numéro 3, enfin. Si nombre des mots et des figures employés et/ou créés le sont consciemment, ces échanges d’auteurs à analystes permettent également de mettre en lumière la nature instinctive de l’écriture. Bien entendu ces auteurs cumulent technique et expérience mais au-delà, ainsi que l’explique Lino, les textes sont là pour frapper. Et c’est de fait que s’imposent naturellement les images, anaphores ou autres jeux de styles et figures de mots.

Il y a évidemment encore mille autres raisons que de suivre et de regarder ces vidéos : du temps d’expression rarement accordé (1h20 pour Lino et Kawa, 1h40 pour Casey) aux annonces musicales en passant, évidemment, par la simple découverte.

Notez que la sessions suivante, le 26 mai prochain, accueillera Fuzati du Klub des Loosers ; on espère, encore une fois un petit replay à savourer.

« J’vais te donner un scoop, il peut même y avoir des textes de rap où il n’y a pas de punchline » (Lino)

Retrouvez ci-dessous les 4 rencontres filmées et diffusées sur YouTube : Lino (d’Arsenik), Kohndo, Dooz Kawa et Casey.

A voir aussi sur YouTube, avec un angle légèrement différent : « J’ai choisi d’être un MC – Sciences Po Paris »