[Edito] Du bonheur
La musique rend heureux. Vraiment. C’est en tout cas une assertion avec laquelle je vis depuis… disons longtemps ?! Bref. Sauf que jusqu’à très récemment je ne m’étais jamais demandé pourquoi. Et devinez quoi ? Je crois que j’ai une réponse… toute personnelle c’est entendu – il s’agit d’un édito oui ou non ! -. Je vous mets ça là.
Before the beginning
Commençons par évacuer un truc. Un petit truc. Je ne confond pas (s’il vous plait ne le faites pas non plus) joie et bonheur. Non non. Du coup, si la Compagnie Créole n’a rien de sacré ou de diabolique à mes oreilles, « Ca fait rire les oiseaux », chanson joyeuse de mariage joyeux avec des gens joyeux ne fait pas briller mon soleil. Désolé les copains.
Ce que je veux dire c’est par là c’est que mon bien être ne tient pas à l’orientation positive ou négative d’une piste, album ou autre. C’était une mise au point évidente mais nécessaire (ce n’est pas toujours antithétique). Dans mon cas bien précis, d’ailleurs, la musique joyeuse ne fonctionne pas spécialement. Chacun son truc, perso, je suis plutôt mineur (la gamme hein).
Autre chose, j’exclu totalement de cette explication les sentiments de nostalgie et/ou de familiarité musicale. « Le petit pont de bois » d’Yves Duteil (oui je ne saisi mes exemples que dans le haut du panier) a beau me faire penser aux moments passés dans la cuisine familiale en compagnie de mon adorable maman, cette chanson, tout comme « Le zizi » de Pierre Perret (et de 3), ne fonctionne pas.
Bien entendu il y a des cas où on est un peu borderline entre la nostalgie et la magie musicale. Prenez le somptueux « Live at Slane Castle » des Red Hot Chili Peppers (2003) par exemple. J’ai vécu tellement de choses en écoutant et/ou regardant l’enregistrement de ce concert (auquel je n’étais pas) qu’il m’est difficile de le séparer franchement du sentimental. Heureusement, puisqu’on parle de musique ici, on a le droit (voire le devoir) de subjectivité.
Everything in its right place
C’est la que ça se corse. Je pense/je crois/j’espère que le bonheur est une notion propre à chacun(e) qu’il l’ai vécue ou non, conscientisée ou non, énoncée ou non. Personnellement, quand je m’efforce de le formuler, c’est toujours un peu de la même façon que ça sort : le bonheur c’est quand tout est à sa place.
Dans ce « tout » j’inclue ma personne, ceux qui m’importent, ce qui m’importe et une sorte de situation globale. Le « à sa place », quant à lui, n’a rien de militaire. On parle de bonheur, ne l’oublions pas. Bien entendu, il s’agit d’une prise de vue égo-centrée (et égoïste) ; être heureux est égoïste pour peu qu’on soit un peu réaliste (enfin c’est mon avis).
My Life
Une fois cette « définition » développée et approuvée, mon expérience musicale — sujet de cet édito — n’est pas très très difficile à expliquer ; passons toutefois par l’exemple pour la rendre plus réelle, moins théorique en tout cas.
Séquence souvenir. En 2003, alors étudiant, je révisais un quelconque partiel à la bibliothèque universitaire, casque sur les oreilles, certainement bien plus concentré sur la zic que sur le travail. L’album : « Dead Cities, Red Seas & Lost Ghosts » de M83. Sans doute la meilleure époque du groupe encore composé de Nicolas Fromageau et d’Anthony Gonzales (désormais seul à la barre), mais ceci n’est qu’un avis personnel. Bref. Ce devait être ma première écoute de « On A White Lake, Near A Green Mountain » (écouter ci-dessous) et quelque chose s’est déclenché. Le sentiment que chaque note, son, synthé ou kick qui, venant un peu plus emplir l’espace, n’aurait pas pu mieux s’accorder avec le reste de l’instrumentale. Une sorte de synergie naturelle et puissante ; tout était simplement à sa place.
J’ai volontairement choisi cet exemple car il s’agissait d’une première écoute, d’un flux audio tout neuf pour mon cerveau. Ce souvenir me permet de mettre en lumière une mécanique un peu différente ; exemple numéro 2.
From the sound inside
La discographie « solo » (Ataxia compris) de John Frusciante est une (des) bande(s) originale de ma vie ; elle m’a accompagné et m’accompagne régulièrement, tant est si bien que je suis capable d’écouter des albums entiers sans même les diffuser physiquement… en les « entendant » dans ma tête. Bref. Vous voyez le topo et peut-être le vivez-vous aussi avec une autre œuvre. Aujourd’hui, écouter un album (ou un titre) de Frusciante, c’est m’attendre à chacune des phrases musicales note à note, des sons, des environnements sonores, des enchainements… Tant et si bien que mon cerveau semble comparer, ou plutôt reconnaitre, l’œuvre que j’écoute par rapport à « l’image » sonore qu’il en conserve. Et devinez quoi ? Tout est à sa place.
Attention, la nostalgie évoquée plus haut est bien évacuée de ce processus de quasi-relecture, de reconnaissance. En outre, ce qui rend cette « opération » logique, musicale et sensorielle possible n’est autre que la séquentialité de la musique. Comprenez que ce qui rend un morceau si spécial qu’il déclenche ce sentiment de plénitude en moi, c’est que la note b est bien après la note a et avant la note c, ainsi que cette voix, là, que cette reverbe sur ce synthé, etc.
Every person
Bien entendu, comme pour chaque chose, il y a des moment et des états d’esprit plus propices à ces petits bonheurs musicaux. Prendre le temps d’une écoute est souvent la clé. D’expérience je me suis rendu compte que très peu de personnes sont capables de se réserver un créneau d’écoute ; la musique est malheureusement souvent reléguée au second plan d’une autre activité cérébrale. Je ne crois pas qu’il existe de session d’écoute collective au même titre qu’il existe des lectures d’œuvre littéraires, hors concert j’entends.
Enfin, je suis certain que nous avons chacun notre propre façon d’apprécier la musique (« merci Captain Obvious »). De la même façon, j’imagine que chacun vibre différemment : par un mécanisme, une logique ou ouverture différente. J’espère que ces quelques mots, au-delà de mon expérience perso, auront permis de poser une ou des questions au lecteur que vous êtes.
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